vendredi 4 septembre 2015

Hovertrain/Explosive Coolies l'interview croisée




En 1990 le groupe Explosive Coolies (Angers) débute son projet. Un ep 4 titres, des 45t et des participations à des compilations sous les bras, les 4 membres ont silloné les villes de france et d’ailleurs, Explosive coolies était reconnu par tous comme un groupe en devenir mais des évènements majeurs ont mis fin à ce projet. Quelques années et des cheveux blancs plus tard on a retrouvé Laurent qui maintenant officie dans Hovertrain, son nouveau projet. C’était pour Paranoïa fanzine l’occasion de faire une interview croisée entre les deux groupes avec Laurent qui s’est livré sans langue de bois.



1) Salut Laurent peux-tu te présenter et présenter ton projet Hovertrain?
Tout d’abord Jean-Louis, je n’aime pas parler de « mon » projet même si je suis à l’origine avec Manu (guitariste) de Hovertrain. Nous sommes quatre, nous sommes un groupe. C’est très important pour moi.
Bon, mon histoire, même si je n’aime pas trop parler de moi, enfin, comme tu me le demandes, je vais tenter d’y répondre, bref, mon parcours et Hovertrain... 
J’ai commencé  à écouter du rock à l’âge de 14 ans, disons que j’étais très bien entouré, mon cousin m’a offert mon 1er 45t, Marquis de Sade et mon  1er album Starshooter. 
Mon 1er concert fut Edith Nylon à Angers, j’avais demandé l’autorisation à mon père, ma mère n’était pas d’accord, j’avais fait le forcing. 
Je fréquentais aussi un magasin de disques à Angers, j’y ai découvert les Dogs, les New York Dolls, les Gloires Locales,  Sonic Youth, le  Velvet, Johnny Thunders, les Buzzcocks,  Gun Club, Métal Urbain, Joy Division, des tas de groupes, la grosse claque.
Par la suite, j’ai réalisé un fanzine « Underground Life », une dizaine de numéros, et puis, surtout, j’ai eu la chance extraordinaire de voir le 1er concert des Thugs dans un bar d’Angers, et ce fut la révélation. 

La rencontre avec Eric et Christophe Sourice a été déterminante dans mon parcours, Christophe est à l’origine de ma décision de prendre une guitare et de faire de la musique, encore aujourd’hui, je lui en suis très reconnaissant.
Par la suite, Gougnaf Mouvement est venu s’installer à Angers et Rico du label m’a demandé de réaliser des affiches promo pour le label (Shériff, Noodles, Red London, Les Rats etc.)… J’ai été aussi road des Shaking Dolls. Tournée en Italie et en Suisse. Merveilleux groupe de scène. 
J’ai fini par me mettre à la guitare, j’ai appris tout seul (« DIY »). J’ai débuté dans Death Row B, ensemble, on a réalisé une démo 4 titres enregistrée à la Cerclère (locaux de répétitions à Angers), à laquelle participait Jean-Pierre ex Seconde Chambre et futur Explosive Coolies. 
On a fait un concert en première partie des Wampas. Ce soir-là, j’ai beaucoup échangé avec Marc Police, le guitariste des Wampas. Une rencontre qui m’a marqué…
J’ai rejoint Love Fuzz, une association de concerts, je réalisais leurs affiches, et c’est là que j’ai rencontré Manu, avec qui j’ai créé Hovertrain. Mais avant ça, on a monté Interzone Inc, on a organisé des concerts au Chabada (Les Thugs,  Trivia, Prohibition, Dum Dum Boys, Diabologum, Bästard, Belly Button, Soap etc.) et à l’Etincelle, un lieu autogéré….J’ai participé aussi à l’élaboration de la pochette des Thugs I.A.B.F….
Après la fin des Coolies, je suis parti vivre à Bruxelles, j’ai lâché complétement la musique, j’ai fait partie d’un lieu extraordinaire, le cinéma Nova, un cinoche indépendant, je m’occupais de la programmation des expositions, j’ai réalisé des installations urbaines, quelques expos de photos, je participais aussi chaque été à un festival itinérant de cinéma en plein air organisé par le Nova, je m’occupais des installations lumière, bref, je garde un merveilleux souvenir de Bruxelles, et de la Belgique. 
De retour en France, je suis tombé amoureux et je me suis installé à Paris. On s’est retrouvé avec Manu et on a décidé de monter le projet Hovertrain avec une boite à rythmes  sans savoir où on allait. Pierre est arrivé à la batterie, il jouait dans un groupe à Angers,  Yag(h)e avec quelques concerts à son actif, puis Eric nous a rejoints à la basse. 
On était tous originaires d’Angers, ça a été la rencontre improbable à Paris. Nous avons fait quelques concerts, en Belgique et à Paris. Puis Eric a quitté le groupe, et Séb est arrivé. C’est le bassiste qu’il nous fallait, humainement et musicalement, la magie s’est vite opérée. Mais Manu a choisi de quitter le groupe... 

2) Votre musique est un mélange de rock, garage, noise, psychedelic. Où puisez-vous vos influences?
Je ne sais pas si on peut parler d’influences. On est très curieux, on écoute des tas de trucs, on va aux concerts régulièrement, surtout Séb. 
Oui, on écoute de la noise, du garage, de l’expérimental, du punk … Il suffit d’aller sur notre page Facebook, on n’hésite pas à balancer ce que l’on aime, on ne parle pas que de Hovertrain.
 A Paris, tu as la chance de voir des tas de groupes, donc, il en ressort quelque chose dans notre musique. A l’avenir, je serais assez pour faire quelque chose de plus expérimental, de plus noise tout en gardant un côté « pop ».
En ce qui me concerne, Dada, les surréalistes, les situationnistes (le mouvement punk s’en est largement inspiré) et l’architecture font partie de mes influences.
La musique, c’est comme une construction, avec ses fondations, puis le chantier se met en place, et petit à petit, émerge un immeuble. Tout en gardant ce côté « urgence », ce côté rebelle, bref, punk.

3) Vous avez mis 3 titres sur le Bancamp du groupe qui datent de 2013. Où en est Hovertrain aujourd’hui?
Suite à un concert à Paris en février 2015 qui s’est mal passé, Manu , le guitariste, a décidé de quitter le groupe.  C’était un peu dur à encaisser, je n’en veux pas à Manu, c’est quelqu’un que j’aime beaucoup, mais il est parti quelques semaines avant qu’on rentre en studio  pour un LP 6 titres sur Lago Records (Rennes).
On va tout reprendre à zéro, et l’objectif, c’est de tourner et de faire le disque…
On ouvrira alors un site Internet.
Parfois, tout ça, c’est un peu compliqué, nos emplois du temps ne nous permettent pas d’avancer aussi vite qu’on le voudrait. 

4) Tu étais membre du groupe Explosive Coolies. Peux-tu nous remémorer l’histoire du groupe en quelques lignes?
On a commencé dans les années 90. Le projet Explosive Coolies s’est monté avec Jean-Pierre Théolier de Seconde Chambre. Nous étions orphelins de nos groupes respectifs, et tout naturellement, comme nous nous appréciions, nous avons décidé de passer à la vitesse supérieure. Sylvie nous a rejoints à la basse, on jouait avec une boîte à rythmes.
Notre 1er concert, c’était en 1ère partie de Nova Mob (Grant Hart, ex Hüsker Dü) à Angers, Christophe Délice était là dans la salle, après le concert, il est venu tout de suite nous voir, et il a proposé ses services à la batterie. 
L’aventure Explosive Coolies pouvait commencer, on a très rapidement enregistré une démo, on l’a balancée partout, et le résultat était au-delà de nos espérances. On a eu plein de chroniques, des interviews, des titres sur des compils K7 en France et en Espagne… Les concerts commençaient à s’enchainer, et puis Black et Noir nous a proposé d’enregistrer un titre, Mama Droga, pour leur compilation « Enragez-vous ». L’enregistrement au studio Black Box, à côté d’Angers, avec Ian Burgess, a été une expérience inoubliable, et nous étions très heureux de nous retrouver sur la même compilation avec Les Thugs, Noir Désir, Drive Blind, ….
Ca nous a ouvert beaucoup de portes, notamment pour les concerts, ensuite un 45t chez Colour Sound (Toulouse) un titre sur la compilation « Never Get Plugged » chez Total Heaven (Saintes à l’époque) avec Drive Blind, Burning Heads, The Sleepers, Dog Shop etc.  Un titre sur la compilation Atlhètes et psychologues sur le label Sajou (Nantes) avec Katerine, Orange Blossom, Savel etc.
Ensuite Black et Noir nous a proposé de rentrer dans l’écurie pour un cd 4 titres produit par Christophe Sourice. 
Après la sortie du disque, les concerts se sont enchaînés, festival off des Francofolies à La Rochelle, festival Radio Béton à Tours, festival Nevers à vif, 1ères parties des Thugs à Nantes et à Angers, Brest et La Rochelle avec les Uptown Bones et les Dirty Hands, quelques dates avec Hint, Rex Club à Paris, Instants Chavirés à Montreuil, Besançon avec Sister Iodine et Bastärd,  Lille avec les Dum Dum Boys, à Hambourg et à Amsterdam,…
Nous avions décidé tous ensemble de ne nous consacrer qu’à la musique, de sortir un album, d’arrêter nos activités « professionnelles au moins temporairement». 
Suite à une soirée bien arrosée, nous avons eu un grave accident de voiture, notre sonorisateur est resté six mois à l’hôpital, et là, Sylvie en a eu marre, elle est partie du groupe. Christophe a fait de même. Nous nous sommes retrouvés à deux Jean-Pierre et moi, bien décidés à poursuivre. Puis Cali (ex Bepi Faliero) est arrivé à la basse. Christophe Sourice nous a dépannés pour plusieurs concerts, avant que Cédric ne reprenne la batterie.
Nous avons continué les concerts. Mais je traversais à l’époque une sale période sur le plan personnel, le décès de mon frère n’a fait qu’accentuer le désir d’arrêter les Coolies. Je voulais partir d’Angers, j’en avais marre aussi de la scène rock, je voulais vivre autre chose. Notre dernier concert fut au Chabada à Angers avec les Dum Dum Boys.


5) Cela a été une belle aventure, as-tu gardé en tête des moments forts et peux-tu nous raconter une anecdote?
Ouh là, difficile… J’ai eu plusieurs moments très forts. Notamment, une après-midi à Angers, J’ai passé l’après-midi à refaire le monde avec Buck, des Real Cool Killers, et Christophe Sourice des Thugs. 
Buck et moi, on s’enfilait des bières pendant que Christophe lui buvait de la limonade. C’était un moment magique. 
Autre souvenir fort, notre concert à Besançon avec les Bästard et les Sister Iodine. Eric des Bastärd nous a proposé de jouer en tête d’affiche, on n’en revenait pas, et le concert s’est super bien passé. 
Il y a eu aussi la 1ère partie des Thugs à Nantes, devant 1000 personnes. Il y avait aussi les Skippies, mais d’eux, je ne garde pas un merveilleux souvenir !
Et puis l’Etranger, Amsterdam, le concert à Hambourg dans un squat devant 300 personnes, presque que des Français dans la salle. On a vécu des concerts bien rock’n’roll avec les Dum Dum Boys, et puis les Dirty Hands à Brest…. Hint.

6) Que peux-tu nous dire sur les membres du groupe, les as-tu revus et que font-ils maintenant? 
J’ai revu Jean-Pierre à Paris, on a fait un concert au Point Ephémère à Paris, quatre, cinq morceaux et puis, depuis plus rien. 
Il a aussi publié « Résidence » en 2004, aux éditions Calmann-Lévy. Sylvie est CPE dans un lycée à Angers et Christophe, je crois, travaille pour une association humanitaire du côté de Bordeaux…

7) Ce fût une belle époque que l’on a vécue quand même, les disques sortaient à foison, les groupes naissaient les uns après les autres. Il y avait vraiment une envie de se faire plaisir et de faire plaisir. Les gens s’intéressaient à tous les groupes, les fanzines, les radios, les concerts,  etc. Aujourd’hui il reste quelques irréductibles mais les jeunes d’aujourd’hui s’intéressent beaucoup moins. Peux-tu nous dire toi ta façon de voir les choses et nous dire ce que tu en penses?
Certes, ce fut une belle époque. Tout était à construire. Il n’y avait pas de salles, pas de locaux de répétition, des assos émergeaient de partout pour pouvoir organiser des concerts, il y avait tout un réseau, les choses étaient plus simples. 
Tout une scène en France, de 76 jusqu’aux années 90, s’est structurée, musicalement, politiquement, pour arriver à concurrencer l’industrie musicale classique, je pense notamment aux Olivensteins, Métal Urbain, les  Bérus, Les Thugs, Les Shériff,  les labels  New Rose, Bondage Records et Gougnaf Mouvement, les fanzines On Est Pas Des Sauvages, On A Faim et Nineteen, par la suite, Violence, Twenty One Again  etc.
Aujourd’hui, les fanzines ont quasiment disparu, enfin, je ne suis pas très au courant de l’actualité des fanzines, mais j’ai l’impression qu’il n’y en a plus beaucoup sur le rock à part Abus dangereux, Rock Hardi et quelques-uns qui font de la résistance. 
Les assos de concerts (loi 1901) n’existent plus, enfin, si peu, merci la SACEM d’avoir tout bousillé. En ce qui concerne les Coolies, on envoyait des démos, chacune en 500 exemplaires, et ça répondait de partout. Je dis ça, parce que nous avons balancé notre démo Hovertrain à des radios, des webzines etc., et nous n’avons pas eu beaucoup de retours. En parlant des salles, les structures institutionnelles,  elles ne font pas leur boulot. Ce sont toujours les mêmes qui y jouent. C’est très difficile de tourner pour un groupe... 
Je ne suis pas persuadé que les jeunes s’intéressent moins, ils jouent dans des groupes, ils montent des labels, j’ai  l’occasion d’aller en concert, et il m’arrive de discuter avec eux. Ils me balancent Pussy Galore, les Dogs, les Olivensteins, ils sont curieux de tout ce qui sort sur le net, ils vont fouiller dans la discothèque de leurs parents… Actuellement, je me demande où est la transgression. On vit dans un monde de Bisounours. Tout est aseptisé, contrôlé, manipulé… Depuis Nirvana, il n’y a rien eu de marquant.
Les disques sortent à foison, il y a un réel engouement pour le retour du  vinyle, c’est une bonne chose. Des labels comme Born Bad, Teenage Menopause , Danger Records, Rejuvenation font un super boulot. Je ne suis pas forcément toujours d’accord avec leurs choix artistiques, mais dans l’ensemble, c’est positif.
On peut encore écouter pas mal de bons trucs mais il manque la transgression et plus de solidarité entre tout le monde, les groupes, les labels, tout ça. 
On est passé à un stade un peu trop individualiste à mon goût. A part peut-être les gens de Teenage Menopause et Born Bad, qui d’ailleurs sont copains.
Sinon, dans Hovertrain, on s’éclate. On est une somme de gens passionnés et curieux.

8) Neuf morceaux des Explosive Coolies vont être remasterisés et une page Bandcamp devrait voir le jour très prochainement. Tu peux nous en dire plus là aussi ?
Oui, depuis le temps, j’avais envie. Et je vais l’ouvrir cette page Bandcamp des Explosive Coolies. Je n’ai pas envie que cette expérience reste confidentielle. Parce que c’était un groupe à part, unique dans le paysage musical français. 
Je ne suis pas mégalo, mais j’écoute tellement de choses que lorsque j’écoute les Coolies, j’ai l’impression que nous étions à part.
Concernant le remastering, c’est Philippe, qui réside à Saint-Martin aux Antilles, qui va s’en occuper. Il participe aussi au retour de Closer Records.

9) Que penses-tu de la reformation de certains groupes français avec une tournée et des sorties de disques ?
Pas grand-chose finalement. Je ne pige pas trop. 
Je m’en fous  de la reformation des Dirty Hands, de Casbah Club, de Seven Hate. Je me pose la question de savoir ce qu’ils écoutent actuellement…
Bref, tout cela est du passé et je ne suis pas prisonnier du passé.
Certes, moi aussi, j’écoute les Sonics, les Seeds, les Kinks, Vince Taylor, The Monkees,  Spacemen 3, les Cramps, les Dogs, des groupes de garage obscurs des sixties, j’écoute aussi des trucs actuels comme JC Satan, Acid Baby Jésus, Oiseaux-Tempête, La Terre Tremble, Marvin, Chatterbox, Dead, Crash Normal, Mary Bell,  A Place To Bury Strangers etc.  

10) Aura-t-on un jour la surprise de revoir les Explosive Coolies, et que penses-tu faire toi personnellement?
Il n’y aura certainement pas de reformation des Explosive Coolies je ne vois pas l’intérêt. 
Par  contre, j’aimerais bien voir sortir un 10 titres en vinyle des Coolies… Il y a de la matière.
Et puis, j’aimerais beaucoup monter un label. Un rêve de gosse.
Faire quelque chose musicalement  avec Christophe Sourice, ça fait longtemps que ça me titille. 
Il y a aussi Chatterbox (créateurs du label Lago Records) que j’aime beaucoup, jouer avec Camille et Jérémie, ça pourrait être cool…
Quelques projets dans mes cartons donc, mais c’est surtout Hovertrain qui compte, on a le potentiel. 
L’objectif n°1, c’est de sortir un LP 6 titres avec Hovertrain et surtout de parcourir les routes de France, de Navarre et de l’Etranger. 
J’y crois.


Interview : Jeanlouis
Photos : Dominique (baby fire)

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