mercredi 9 décembre 2015

Cut the navel sting


Originaire d’Angers, Cut the navel string fut une énorme surprise musicale dans les années 90. L’histoire d’une bande de potes, qui avec insouciance et énergie ont sorti un album aux accents metal-indus et aux dissonances et sonorités tranchantes.

Aujourd’hui le groupe renaît de ses cendres et le label Nineteen something devrait ressortir leur cd «Takis». Au travers de cette interview Pascal et fred vont vous faire découvrir l’histoire d’un groupe unique et attachant.


Qui est à l’origine de la formation du groupe?

Fred : Au départ, c’est une histoire entre Frank (basse), Pascal (guitare) et Jean Louis (chant et clavier). La rythmique était assurée par une boite à rythmes. Ensuite, Jean Louis a arreté le massacre, Denis l’a remplacé au chant et Mathieu est arrivé avec sa caisse claire, sa ride, son charley et autres toms. Quant à moi…. Je crois que Pascal se sentait un peu seul à la guitare, il cherchait un gars pour lui montrer comment on fait des accords simples ! Ca tombait bien, je ne savais faire que ça.
Pascal : Bon, la question, à mon avis, n’est pas vraiment le “qui” mais plutôt le “comment “… une petite chose en  entrainant une autre … Je me souviens bien de deux trois détails aussi banals que marquants.
Un après-midi comme un autre où on me colle une basse dans les mains, je crois vraiment que si Jean Louis (difficile de passer à coté de lui si on remonte dans les premiers mouvements) ne m’avait pas forcé, je serai encore à user mes cordes au fond de la cave. 
Merci Jean Louis! 
Et en plus, c’est quand même le premier chanteur des Cut en un sens (sourires) 
Bon, l’élément fondateur à mon avis est notre rencontre avec Franck (bassiste) et l’un de ces ennuis caractéristiques d’un après midi d’une ville de province; et bien évidemment l’alchimie de quelques notes  qui te donnent l’impression d’être un génie qui ne plait qu’à toi : heureusement ou pas, les notes n’ont pas été enregistrées  … (sourires) . Bref oui, à un moment, il y a eu une étincelle; la cigarette était allumée et on avait vraiment envie de la fumer ...

Comment vous est venue l’idée de former Cut the navel string et pourquoi?
Pascal : Les cut, c’est l’improbabilité dans le chaos et surtout une étincelle en bord de Loire !!!
On n’a jamais eu l’idée des Cut. Elle s’est imposée d’elle même. Je crois même que c’était inévitable.
(Toujours facile à dire avec un peu de recul …)
Nous avons retrouvé chacun un sens à ce que nous faisions à ce moment là. Je pense que nous en avions tous besoin, envie et en plus, nous cherchions chacun à notre manière un moyen de s’exprimer, de crier au monde qu’on est dedans, et que, ce monde, on ne voulait pas en subir les travers. 
Voilà ce qui nous a rejoint au delà des rencontres vraiment toutes aussi improbables les unes que les autres.
Bien sur, le fil conducteur reste dans les échanges musicaux mais je ne suis pas certain que cela marche si on remplace la musique par le football ou tout autre chose.
Pascal : Fred t’en penses quoi toi ? 
Fred : Difficile de s ‘exprimer là dessus quand on est le cadet. Avant d’arriver dans les Cut, je jouais pratiquement que des reprises dans une formation ephémère. Je bouillais d’envie de pouvoir goûter à la composition, d’intégrer un “vrai” groupe... Le son qui émanait de la salle de répet d’à côté, celle des cut , c’était vraiment tentant, nous en étions presque jaloux même je crois…
Pascal : Je crois qu’on n’avait pas vraiment conscience de la chance qu’on avait …!

Est-ce que le groupe était avant tout une histoire de potes?
Fred : Oui, bien-sûr ! 
En fait, je ne suis pas arrivé par hasard,  je connaissais Denis et Mathieu avec qui on avait déja partagé une experience musicale.  Je ne connaissais ni Frank, ni Pascal, ce n’était pas du tout gagné d’avance d’ailleurs cette histoire d’amitié avec ces deux là.  Il a fallu faire tomber quelques masques. Mais ces masques tombés, nous avons vraiment réussi à fonder une sorte de tribu. Nous partagions à peu près tout : appartements, galères, projets… même nos copines (sourires). Il y a eu un l’appart de la rue Plantagenêt qui était vraiment devenu un repère pour les fins de soirées et autres “day off” de groupe en tournée… Je crois me souvenir que Virginie Despentes est passée par là.
Pascal : Plus que cela, on était vraiment dans l’idée de se faire une vie différente, de rêver et vivre autrement … l’univers des possibles, quoi … 
Mais oui,  tu as raison,  c’est avant tout des rencontres toutes aussi improbables soient elles. Ce n’est pas souvent finalement, que ce type de rencontre se produit. Et cela c’est le plus important !
Avec Franck, je crois qu’on a eu un vrai “coup de foudre” à cette époque, on ne se quittait plus, on dormait ensemble (on a peut être manqué quelque chose dis donc… ? ), on écoutait les Joy et Bauhaus, on trainait dans la ville en jouant les beaux gosses (là dessus Frank était un caid).  Et surtout on répétait, on répétait …  C’était vraiment notre moteur, des boulimiques de répet ;)
Denis, c’est une autre histoire mais tout aussi singulière. Mais je laisse Denis la raconter avec ses mots; je crois quand même que la liaison entre Frank et moi d’une part, puis  Mathieu & denis,  s’est faite ici. Une très jolie période ….
Bon, et puis Fred, je te laisse le mot pour nous deux ...sinon je sens que je vais m’étendre ...
Fred : Nous n’allons pas ici raconter notre histoire d’amour, euh non d’amitié pardon… c’est hors sujet !
Je me souviens que nous avions une sacrée envie de refaire le monde ! Nous ne jurions que par le collectif, le partage, le “do it yourself”. Nous étions à l’affût de toute expérience de création, autant plastique que sonore, théatrale, cinématographique… Nous voulions même acheter une usine désafectée pour y créer le plus grand centre culturel autogéré du coin, à l’instar de ce qui se faisait en Italie, en Allemagne, en Suisse et en Belgique. Nous l’avions même visité cette usine avec des gars en costard cravatte...
Pascal : Et puis les Cut,  cela ne se résume surtout pas à des rencontres entre nous 5 ! 
Impossible d’éviter Hugues, un réel bon gros matou celui là… indispensable dans l’équilibre …
je ne peux pas oublier non plus Mathilde, Bettina , Laurence, Guillaume, Rico, Jean Louis, Stéphane (Chailloy) , Christophe, Peter Deimel, Jaja, Iain Burgess…  et bien d’ autres encore ….. Un vrai calendrier des sapeurs pompiers … 
Non, ce qui est vraiment important à mes yeux, c’est que nous n‘avons jamais pensé uniquement à 5 mais plutôt comme une communauté de personnes qui ont cru à cela. Peut être pas une communauté mais un groupe au sens très large … Les individualités, c’est plus tard ...
Fred : Oui, il y a eu une période où l’on voulait vraiment toucher à toutes les formes d’expression. Par exemple, Franck s’est mis à faire des sculptures avec de vieux métaux. Celles-ci se retrouvaient sur scène. D’ailleurs, le camion ressemblait à une espèce de quincaillerie improbable.. 
Je crois que ce qui a déclenché cette envie de mélanger musique et visuel c’est la rencontre avec Stéphane Chailloy lors de son expo à la Cerclère. L’art de Stephane était vraiment en phase avec notre musique. Mais Stéphane était un artiste indépendant, solitaire et assez insaisissable. Il y a eu alors la rencontre avec Hugues Jouvin qui était en première année des beaux arts de Nantes. Pour la petite histoire,un joli matin de juin, nous nous sommes retrouvés tous les 5 devant un jury de professeurs de cette école des beaux arts de Nantes, à jouer notre musique quelque peu bruyante afin de valider la première année de l’artiste en herbe. Rebelote la 2ème année. 

D’ou vient votre nom, y a-t-il une histoire derrière ça?
Pascal : Le nom a commencé à nous titiller avec ce qui se passait en salle de répet (c’est vraiment dans cette petite salle de la cerclère que nous étions véritablement nous même). 
On sentait bien que nous n’en étions plus à de simples répets, qu ‘une effervescence commencait à s installer autour, et que nous avions besoin de trouver une identité dans tout cela … 
Bref, on a joué au groupe qui se cherche un nom ! L’ultime quoi (sourires)!
Et là je crois qu’on a été brillant (sourires)!!! 
En faisant tourner nos idées (ou non idées), on est arrivé, je ne sais même plus comment, à l’idée d’une espèce de machine en marge du système (rebelle et mordant non ? ). Nous devions être en pleine montée d’hormones postpubères. Bref, voici comment on en est arrivé à un truc du genre “Couper le cordon ombilical” (waou non ?)
Comme on était  tous des “purs sangs bilingues” issus de la pampa anglaise et galloise, on a pris un dico et traduit juste littéralement l’expression qui ne signifie en rien ce que nous voulions exprimer en bon anglais.
Finalement,ce n’est pas si mal de porter un nom aussi crétin. On a un peu de mal à le prononcer ou le dire,  par contre une fois qu’il est installé dans les têtes…. peu de chance de ne pas le retenir ;) 
Par delà le bien et le mal quoi … (sourires)
Fred : Moi, le souvenir que j’en ai, c’est à travers un film dont nous étions tous assez fan : le tambour. Je ne me souviens pas bien mais il me semble que Oscar, le gosse délire sur sa vie fœtale a un moment….
Pascal : Il va falloir que je revois ce film (souvenir) ... je ne me rappelais même plus de ce détail mais tu as raison y avait un truc dans cet esprit aussi...

Comment avez-vous choisi votre style de musique. C’est parti de quoi?
Fred : C’est le genre de question l’on aimerait botter en touche … Pour ma part, quand je suis arrivé, j’étais plutot influencé par le punk rock…. Il a vite fallu que je m’en débarrasse de ce goût pour les morceaux à 4 temps...Une bonne école pour les “rythmes à la con” les Cut !!!
Pascal : Nous n ‘avons jamais vraiment choisi un style, ce qui nous transportait restait dans les notes qui s’échangeaient Je crois même que c’était notre meilleur moyen d’échanges au sens émotionnel. 
Fred : C’est vrai que la manière de composer s’afranchissait de tout style. Nous faisions surgir des notes ou des rythmes dont nous nous étonnions nous même … les capacités de larsenner, de vrombir , de faire dissonner les guitares, la basse, le chant aussi, tout cela faisait partie de notre marque de fabrique. Nous n’avons jamais été de grands techniciens, à part Franck et Mathieu. Nous laissions beaucoup de place à l’improvisation, l’humeur du moment. C’est à ce niveau que nous pouvons nous considerer comme un groupe bruitiste ….
Pascal : oui … c’est vrai et  je crois que les repets des Cut , c’était avant tout une expérience et des improvisations … elles n’ont pas toutes abouties mais tous ceux qui sont venus nous voir, en gardent un souvenir … Il faudrait leur demander ;)

Le groupe est né vers 1992 à Angers je crois, à l’époque c’était l’effervescence dans votre ville, Les Thugs étaient à leur apogée, des groupes comme Casbah club, Dirty hands, Hydrolic system, et j’en passe ont surgi. Avec le recul, comment viviez vous ce qui se passait autour de vous et est-ce que c’était un avantage ou un inconvénient d’habiter Angers?
Fred : Les deux mon capitaine !… Pouvoir répéter ad libitum nous  a été possible graçe à des gens comme Eric Sourice, Casbah  Doudou , les Theoliers  et tous ceux qui ont fait grandir les cultures alternatives à Angers. Mais cet avantage peut aussi devenir un inconvenient, il faut savoir s’en détacher, avoir sa propre identité, sinon on tourne en rond. 
Pascal : Quand on habite Angers (et c’est sans doute un peu vrai dans pas mal de villes), le contexte est influent On a eu la chance de se retrouver dans une période très riche musicalement. A Angers, la scène oscillait déja entre plusieurs courants … La ville évoluait à travers ses groupes et son activité musicale, il y avait une vraie effervescence à cette époque. On n’était pas vraiment en phase avec l’esprit rock de la ville mais par contre elle insouflait un état d’esprit et surtout beaucoup de rencontres …
Alors évoluer parmi cette scène même en restant un peu marginal, a sans doute contribué à nous donner un essor et surtout la volonté de faire et de jouer 
Fred : A l’époque, c’est un fait, Angers était une ville “tremplin” pour le rock.Nous avons bien entendu bénéficié de cette appartenance au “rock angevin” mais nous détestions que l’on nous compare aux Thugs, aux Dirty hands. C’etait une mode à l’epoque de dire “le rock d’Angers, le rock de Seattle, le rock de Manchester…” Du coup tu te faisais une idée d’un groupe avant même de l’avoir entendu...
Pascal : Oui la question de l’appartenance au “rock angevin” est devenue rapidement la question traditionnelle … On était assez blasé de celle-ci en fait, elle ne nous intéressait pas énormémemnt, nous revendiquions notre indépendance, nous ne voulions pas être complètement intégré à ce système, la scène angevine, lyonnaise ou autre …  ce n’était pas pour cracher sur Angers mais plutôt pour revendiquer un certain esprit … Nous ne sommes que poussière d’étoile et désirions pouvoir prétendre à vivre n’importe où ! 
Encore une fois, notre musique n’était pas dans les tendances angevines, enfin je ne le pense pas,  même si des groupes comme Seconde Chambre, Hydrolic System ou les Thugs nous ont sans doute donné cette énergie…
Fred : Et aujourd’hui, avec un peu de recul, je crois que l’anonymat des grandes villes a du bon, il permet de se remettre en question plus facilement, de se projeter plus librement.

Justement, on entendait beaucoup parler de vous sans vous entendre ou vous voir. Le bouche à oreilles fonctionnait bien quand même?
Pascal : Nous étions des ombres vivantes qui suscitaient beaucoup de curiosité … Et pareillement à Jean Louis, dans un autre “style”, ce sont les Thugs et LoveFuzz qui nous ont poussés sur la scène dans un premier temps. Je profite de l’occasion pour les remercier.
On adorait répéter et se retrouver dans notre cocon … Trop d’ailleurs. du coup ça intriguait ! Pas vraiment de la timidité, mais nous n’avions aucunement envie de nous lancer tête bêche pour  jouer dans les bars ou autres comme la plupart des groupes le faisait. Ce n’était pas de la prétention, juste l’envie d’agir différemment. Ce qui nous plaisait était de construire et composer;  et ensuite de se produire dans de nouveaux lieux, nouvelles villes, idéalement le plus loin possible … 
Encore un point  qui nous a rassemblés aussi …
Fred : Je t’avoue que ce point de vue me surprend … je n’avais pas l’impression ni d’être mysterieux ni souterrain .. Je crois que nous étions inconnus tout simplement, que nous cherchions à nous faire connaître comme n’importe quel groupe...
Pascal : tu exagères un peu quand même .. Combien de fois nous a-t-on sollicité ? Nous nous cachions derrière cette réponse qui n’en était pas une :”nous ne sommes pas encore prêts” .. Je crois tout simplement que nous attendions le jour où….enfin pour le début … la suite est différente ...
Fred : Hum … Là on est en train de nous parler de la période où l’on a commencé à jouer en concert bien après la longue période de gestation. Il faut se souvenir que trouver des dates de concerts dans les 90’, ce n’était pas evident… 
Pascal : Effectivement j’étais sur le tout début … 
Bon après il reste indéniable que nous avons eu beaucoup de chances … Après notre premier concert, nous avons été contactés par les Trans de Rennes  … Nous nous sommes retrouvés propulsés dès le quatrième concert sur de jolies scène avec un manque d’expérience sans doute mais avec une énergie démultipliée 
Entre temps, c’est Treponem Pal qui nous invitait à faire sa première partie au Farenheit …..Cut the navel String - Treponem pal, ça sonnait pas mal comme affiche, c’est ce que nous nous disions ...
Fonces Raoul ! Y a plus de lignes …
Fred : Et tu as oublié qu’a notre premier concert, effectivement nous avons eu la chance de rencontrer Philippe Richard, un journaliste qui était venu voir Uptown Bones dont nous faisions la première partie. Il a flashé sur nous et c’est lui qui nous a propulsés vers, entre autres, les transmusicales…

Comment se sont passées vos premières répets, saviez-vous déjà ce que vous alliez faire ou est-ce venu au fil des répétitions?
Pascal : je crois que je vais te laisser décrire ta première répét avec Cut The Navel String … (sourires)
Fred : ...audition, entretien d’embauche ?… je crois finalement que je me suis senti un peu seul …
pas bon souvenir en fait, j’ai tout dit la dessus tout à l’heure…
Pascal : Autant nous aimions répéter , autant les morceaux étaient longs à accoucher !!!
Bon déja, nous nous sommes construits musicalement parlant en répétant .. 
C’est là que tout se passait !!!
Ce qui nous sauvait, c’est sans doute d’être très prolixe en idées, le plus difficile était de les canaliser et d’en sortir juste l’essentiel : Ca c’était notre vrai point faible !!!
Il m’est arrivé de réécouter des répétitions, et beaucoup en aurait fait pletors de  morceaux … Nous étions compliqués et nous revendiquions cette complexité … pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ;) 
J’aurai rêvé de composer un morceau comme  “no pussy blues” de grinderman avec les Cut. Juste deux à trois accords en ligne droite qui vous envolent vers d’autres mondes. 
Mais ce n’est pas ce qui nous venait et nous n’avions pas du tout envie de prendre ce chemin (enfin pour ma part) … 
Nous laissions nos inspirations s’installer et nous assemblions ensuite, le coté méca-artistique de notre démarche. 
Autre point aussi, et là c’est plus personnel, je pense que nos morceaux restent toujours inachevés, que nous pouvons toujours et encore modeler avec nos humeurs, nos envies … J’ai toujours cru que la musique reste du domaine de l’indicible, et dans ce sens, on a toujours un truc à exprimer.  
L’évasion est aussi un élément fondateur : nous pouvions rester sur un même plan pendant des heures  …  Et nous ressortions souvent avec cette même torpeur que vous pouvez ressentir après un concert qui vous a plu. C’est ce que nous recherchions avant tout ! En répet comme sur scène (d’ailleurs je crois que c’est dans ces deux éléments que nous pouvions vraiment lacher prise et exceller)  
Aujourd’hui, je me demande toujours où tout cela nous aurait emmené : peut être jouerions-nous une musique encore plus dure, plus bruitiste  ou bêtement plus simple … Je ne peux pas vraiment dire … Ce n’est pas le but mais le chemin qui nous plaisait ...
Fred : C’est intéressant de t’entendre t’exprimer sur ce sujet …pour moi la communion n’était pas évidente … par moment, nous étions un peu autistes en répète. Comme je le disais tout à l’heure, nous cherchions les notes, les rythmes, le nez dans nos pédales, l’oreille sur l’amplis. 

Une démo a vu le jour quelques temps après et des titres sont apparus sur des compiles. Vous pouvez nous en parler?
Fred : Attention il y a eu deux démos … la première était enregistrée par Jaja (Hydrolic System) à la Cerclère .. De là, est née une cassette tellement rare que moi même je ne la possède pas … 
Ensuite c’est l’aventure Iain Burgess … avec Nux Vomica 
Et enfin l’aventure Black Box .. cet enregistrement est à mon sens le plus beau souvenir de ce que nous avons pu vivre en studio : c’était en même temps les rencontres de Peter Deimel, de Iain Burgess. Vraiment une aventure humaine de la spontanéité, de l’imperfection ….
Pascal : Fred, je l’ai encore cette cassette … mais plus le moyen de la lire (sourires)...
Enregistrer était toujours un moment à part dans la vie d’un groupe. C’est ici que les choses se figent ! 
De pouvoir participer à une vraie expérience de vie avec des gens qu’on aurait meme pas pu imaginer rencontrer (je me suis quand meme retrouvé devant Steve Albini qui me demandait la marque de mes lunettes, ça fait un drole d’effet … avec le recul, j’aurai du lui échanger avec une guitare …), C’est clair ça vous marque … 
Maintenant les enregistrements n’ont jamais été à mes yeux ce qui m’importait … 
Fred : ça ne m’étonne pas (sourires) … à la Black Box on nous a demandé d’être carrés. Et là Peter (Deimel) avec son oreille aiguisée nous a remis en place …. Mais, comme disais Pascal tout à l’heure, notre atout était que nous répétions beaucoup. Le fait de jouer ensemble permet vraiment d’arrondir les imperfections, cela donne un certain charme à l’imperfection.

«Takis» votre album est arrivé peu après. C’est toujours une décision importante quand on enregistre un album. Avez-vous eu de la pression et comment s’est passé cet enregistrement?
Fred : peu après que tu dis … !!!!
Je te rappelle qu’entre l’enregistrement de la Black Box et celui du Pays de Galles, il  s’est passé plus d’un an … Une année dans la vie d’un groupe, c’est long surtout pour des indécis rêveurs …
Nous avons un peu eu  l’impression de tourner en rond .. nous avons certes composé des morceaux qui se retrouvent sur Takis  mais nous aurions pu composer deux albums différents et aller vers d’autres horizons plutôt que d’attendre ...
Pascal no comment ...
Alex Newport est venu via Stéphane Saulnier (grand prêtre de Canal aujourd’hui...) . C’est lui qui nous a signé chez Roadrunner. drôle d’histoire aussi cette rencontre (mais ce n’est pas le sujet) . Les producteurs  que nous avions préconisés n’étaient pas dispos, Alex l’était et nous nous sommes tous retrouvés dans l’antre du bassiste d ‘Amon Duul
Enregistrer au Pays de Galles avec celui qui a pu faire sonné Sepultura nous plaisait aussi, 
C’est le studio lui même qui n’était pas à la hauteur …  On a managé comme on a pu ….
Le final a donné Takis. 
Nous ne nous reconnaissons pas totalement avec Takis, honnêtement le son n’est pas à la hauteur. Mathieu (drums) était déçu et je le comprends … 
Maintenant, Takis est présent et reste quand même un grand moment des Cut The Navel String mais ce n’est en rien un aboutissement !
Fred : c’est vrai que nous avons galéré avec Alex Newport pour le mix ! Je me souviens que nous étions deux sur la vieille console toute pourrie et deux fois sur trois il y avait un crash sur une piste. Il fallait passer la bombe contact avant chaque manipulation de potart. Mais nous avons passé de sacrés bons moments dans les Pays de Galles ! Le plus pénible en fait ce n’etait pas cela mais plutôt d’avoir la maison de disque tout le temps sur le dos, pas pour savoir si nous allions bien mais plutôt si nous produisions  bien !
Pascal Hum … 
Fred : Il fallait sortir quelque chose dans l’air du temps ; un poil métal, un petit peu de grunge, un morceau pour la radio underground comme il faut,  bref habillés pour l’hiver  … mais je ne suis pas certain que c’est ce qui nous ressemblait ...
Pascal : Ca c’est sûr et je n’ai pas envie de polémiquer sur le sujet .. Je crois fondamentalement que nous nous sommes un poil perdus ou fourvoyés avec Roadrunner …
Fred : Je me souviens aussi que nous avions présenté à Stéphane Saulnier l’enregistrement de la Black Box en espérant qu’il prendrait cet enregistrement pour en faire notre premier album… Nous nous sommes pris un de ces vents !!  Je ne suis pas sur que c’était la meilleure idée qu’il ait eu de refuser de garder cet enregistrement, dommage !
Pascal : Fred, tu veux vraiment que je dise ce que je pense ...
Disons que d’autres alternatives nous auraient sans doute mieux convenues … 

Cet album était un hommage à l’artiste et inventeur Grec orienté vers une poétique fondée sur les ressources de la technologie. Quel a été l’élément déclencheur pour rendre hommage à cette personne?
Pascal : C’est Frank qui a ramené l’idée suite à une expo qu’il avait vue … Je crois que là dessus il était plutôt visionnaire sur ce point ... C’est vrai que son oeuvre est assez basée sur la mécanique, le cosmique, l’expérimentation, l’énergie, l’érotique et les forces  magnétiques (entre autres)  cela fait pas mal de points communs avec nous et  la musique que nous composions, en tout cas c’était une très bonne raison d’intituler l’album Takis 
On a tous été d’accord là dessus … Cela nous correspondait assez ,pour autant nous n’avons pas la prétention de véritablement  bien connaitre l’artiste … Encore une rencontre que nous aimerions avoir faite…

Revenons à l’ambiance du CD qui est assez sombre et collérique voire oppressant. Il y avait aussi un décalage musical par rapport à ce qui se faisait à la même époque, votre style était-il à contre courant?
Pascal : Ce qui se dégageait de notre musique était sans doute un assemblage de nos émotions et de de notre perplexité face aux différentes années que nous traversions. 
Avec le recul, la colère semble effectivement un moteur indaignable. Et je crois toujours que les périodes politiques et humaines de ces années 90 (le post 80) nous ont bien influençés à ce niveau sans pour autant qu’on le sache ou le dicerne très clairement . 
Difficile de croire en un monde dans lequel les projections du vivant se tournent vers la technologie, la conformité, l’égoisme, le libéralisme et l’individualisme (entre autres...). Aujourd’hui nous allons bientôt promener notre mémoire sous clé et revendiquer un corps qui ne nous appartiendra plus.
Comment imaginer ce que nos cerveaux vont produire ? 
Cela peut effectivement rendre “sombre”. Mais pas que …..
Si nous faisions  une psychanalyse collective (que nous aurions refusée en bloc), il se dégagerait aussi sans nul doute une grosse énergie et joie de vivre que nous cultivions au jour le jour. 
Le paradoxe de nos envies, et de nos vies  … Obsession est sans doute pour moi un morceau qui catalyse bien ce mélange de colère et d’énergie positive ! 
Et tu vois cela contre courant ? Ce qui est contre courant, c’est surtout de ne pas être vivant ….
Fred : Au début des années 90, le post punk, le post rock sont apparus avec des groupes comme Slint, Swell, qui développaient une musique à la fois rythmée, mélodique et mélancolique. Il y avait aussi des groupes qui envoyaient  du bois comme Neurosis. C’est tout cela qui nous inspirait, dans lesquels nous nous retrouvons. On retrouve l’influence de tous ces groupes dans la musique des groupes actuels. Je crois aussi que nous étions, sans doute inconsciemment, inspiré par le climat social, les changements de valeurs qui préfiguraient le monde dans lequel nous vivons aujourd’hui. J’invite tout le monde à revoir Transpotting, c’est tout à fait édifiant à ce sujet. 
Pascal : C’est vrai que quelquefois  je me dis qu’aujourd’hui, on serait sans doute musicalement plus à propos … Par contre,  je ne suis pas certain que ce nous exprimerions serait aussi perspicace … 
Fred : Nous, on a commencé à voir que ce monde ne devenait plus drôle du tout (You’re no fun anymore) et que nous glissions vers une société extrêmement nivelée et sans substance… Apres la rebellion et le cynisme du mouvement punk, la mélancolie, la tristesse, le dégoût, la rage aussi ont pris le dessus. 
Pascal : … Si tu nous laisses sur ce sujet, nous risquons d’avoir énormément de choses à dire ...

Quels étaient les sujets abordés dans les textes, réalité ou fiction?
Fred : Là dessus je vais parler pour Denis… je crois que Denis a toujours aimés les allégories, les paraboles et évidemment la fiction.
Il s’est toujours inspiré de littérature (Truman Capote par exemple dans “In cold Blood”) Des morceaux comme “It doesn’ t matter” ou “In bed with my sister” peuvent mettre en scène des sortes de situations cauchemardesques, fantastiques, surréalistes, peut être un peu à la manière d’ ”Un Chien Andalou” de Bunuel.
Pascal : Nous venons d’évoquer déjà quelques sujets .. 
Nous n’étions pas un groupe à texte, ni véritablement idéologique (ou pas assez). C’est sans doute ici que le devenir des Cut se serait joué aujourd’hui. 
Nous revendiquions un certain état d’esprit libertaire et humaniste. Nous fourmillions d’idées artistiques, littéraires, utopistes, humanistes ou politiques … Et c’est cela qui nous importait le plus: nous restions vivant avant tout. Nous n’étions pas véritablement engagés mais je suis certain que nous le serions aujourd’hui ! (là je n’engage que moi ) 
Nous restons les acteurs témoins d’un nouvel idéalisme….!!

En live derrière vous étaient projetées des images, des diapos. D’où vous est venu ce concept et que représentaient ces images?
Fred : Quand nous avons rencontré Stéphane puis Hugues, nous avions une autre vision de la scène, un truc plus global, nous cherchions à nous intégrer, nous dissimuler dans un univers un peu psychédélique, un peu glauque aussi. Mais là aussi je pense que nous aurions pu mûrir un peu plus, le temps nous a manqué. 
Pascal : Encore une fois ce sont des rencontres qui nous ont imprimés notre imagerie.
Les images étaient très importantes pour nous. Nous avons toujours voulu rester dans l’indicible et nous ne présentions que très rarement des clichés réalistes. En fait Hugues avait conçu une machine dans lequel il injectait de l’huile à travers des diapositives psychédéliques, un bon moyen aussi pour rester dans l’imaginaire et le réel : Il jouait et était un acteur à part entière dans nos concerts. 
Ma plus grande frustration c’est de nous avoir jamais vu en concert. Je pense que cela devait être une véritable expérience et non juste une séance cinéma ou d’illustration sur lequel joue un groupe landa. 
L’huile qui traversait les images diffusait et créait un mouvement aléatoire avec la chaleur du projecteur (ce qui nous donnait des images uniques à chaque concert), un peu comme si la musique devenait liquide, psychédélique et/ou sanguine, rester dans l’univers du vivant avant tout ;)
Fred : Nous étions aussi tres inspirés par des gens comme la fura del bauhaus, von magnet ou encore la tribu pyrophore .. Pendant ces années 90 ca fourmillait pas mal, ca c’etait cool !!! 

Le cinéma était important pour vous aussi, pourquoi?
Fred : Le cinéma était bien moins important que la musique et la littérature mais nous allions pour autant voir les films quand nous avions les moyens (et en la matière, on avait un maître à penser, alias RICO, notre manager).
Pascal : Pour ce qui est du cinéma, je crois qu’Eraserahead était en tête de liste à l‘époque .. reflet de l’alliance du son et de l’image dans un univers de cauchemar onirique. Cela nous allait bien !
“Les Valseuses” passaient aussi en boucle à l ‘appart (pas seulement) 
Le cinéma a toujours eu une influence sur nos as- et ins-pirations 
Et puis,  on ne peut pas oublier  Rico qui nous initiait au cinema de Hong kong (Jonh who et compagnie), aux films de genre etc .. 
Fred : Je me souviens de cette interview de Tarantino où il disait que sans les films piratés sur  VHS Il n’aurait jamais écrit Django et bien nous , nous étions les enfants de la cassette ;)

Si je vous cite des groupes comme Deity guns, Treponem pal, Garbage collectors ou Kill the thrill. Ya-t-il un de ces groupes ou un autre où vous vous reconnaissez musicalement et humainement?
Pascal : Déja trois d’entre eux nous parlent humainement parlant. Je ne me rappelle pas avoir joué avec Garbage Collectors (dommage) … 
Deity Guns c’est d’abord une très grande secousse musicale (un ouragan dans nos oreilles en fait) dans un bar de la doutre (le mezcalibur à l’époque) un certain mercredi puis cela s’est poursuivi à travers d’autres évènements où nous nous sommes retrouvés ensemble (le réseau Angers-Lyon) .. Nous avons même réussi à  nous projeter dans un tryptique Cinema / Concert avec la nuit des morts vivants ensemble ;) Une belle histoire. 
Kill the thrill c’est avant tout Marylin et Nicolas (avec qui nous restons en contact aujourd’hui), et leur véritable gentillesse qui reste !!
Treponem,  c’est Marco qui nous appelle avec sa voix d’outre tombe ; et Bettina et moi dans une Cabine qui n’en reviennent pas …
Fred ton choix c’est qui ?
Fred : Moi je me suis toujours senti assez proche de Nicolas Dick parce que tout simplement nous nous sommes souvent croisés en concert avec Kill the Thrill, et ailleurs ..
Ensuite Deity guns est le groupe avec lequel nous aurions du collaborer et monter des projets…
Pascal : C’est vrai qu’au delà de la musique, nous étions en phase avec un état d’esprit …
Fred : je me souviens de la rencontre à Lyon avec les Deity guns. Des soirées à écouter chez eux  des trucs étranges, venus du Japon, des pays de l’est. C’est si bon de passer du temps à découvrir des trucs nouveaux. Je me souviens que nous notions sur des petits bouts de papier ce qu’on découvrait. Et apres pour retrouver les disques accroche toi mon gars ! Pas d’internet a l’epoque ! 
Pascal : Oui Zeni Geva et les autres …
C’est quand même dommage que nous n’avons jamais eu l’idée ou l’envie de monter  quelque chose ensemble  avec Deity Guns...

A l’époque vous disiez vouloir tourner «là» où personne ne tournait. L’avez-vous fait?
Fred : Et bien à l’époque, nous disions pas mal de conneries. Aujourd’hui, je crois que nous avons fait là où on nous a dit de faire ! En tout cas les rêves de tournées au USA je ne crois pas que nous les ayons eus….
Pascal : Jolie boucle (sourire) Nous avons pas mal tourné en Italie dans les “centro social” notamment (2 tournées) et il nous est arrivé quelques moments épiques. 
Se retrouver ainsi parachuter au milieu d’une “rave” sauvage menée par des travellers anglais dans une usine désaffectée à Milan en fait partie. Je me souviens aussi d’un bar mémorable au pays basque où s’était formé un véritable empilement  humain, Frank s’était même fait sucé les pieds … Jouer aussi dans un festival libertaire ou avec la tribu pyrophore en off de Bourges, cela nous plaisait plutôt ….
Fred, des anecdotes ? 
Fred : Mon meilleur souvenir un concert à coté de Montargis  où l’on a joué devant un mec et son chien ….surréaliste non ? 
Pascal : Et si aujourd’hui, nous re-faisions de la scène je crois pour ma part que je choisirai une démarche singulière : Jouer uniquement nos morceaux en live dans des lieux atypiques. 
Les enregistrements ne seraient alors que d’autres morceaux qui ne concerneraient pas le live et ne seraient ainsi jamais joués. Chaque morceau a sa place ! 
Nous étions avant tout un groupe de scène et d’ailleurs, je crois que nous sommes perçus ainsi. La résonnance de nos morceaux était vraiment faîte pour se vivre, pas seulement pour s’écouter ...
C’est sans doute un joli avenir pour les musiciens de privilégier le réel et le live : d’effacer la matérialisation de la musique est aussi une forme de contre pouvoir aujourd’hui. De ne pas entrer ainsi vers une ultra consommation du son sans savoir un intérêt ou une émotion qui vont avec  est aussi une bonne démarche autant pour le public que les musiciens. 
Je suis assez surpris aujourd’hui par ces névroses de consommation de la musique…  et en fait, si tu demandes à quelqu’un de citer ses dix albums du moment, il est presque perdu … 
Regardez ces festivals où s’enchaînent en masse groupe sur  groupe avec un  public qui suit aveuglement ce que la programmation veut bien leur accorder ! et comme par hasard tu retrouves les mêmes groupes sur l’ensemble des gros festivals …. 
J’ai envie de croire à la diversité, au choix et à l’esprit de ce que peut aussi être l’expression musicale.
Bien évidemment, tout le monde n’est pas dans le même panier et  heureusement il reste encore de très bons festivals, de très bons groupes, de très bonnes démarches  … Et impossible de nier aujourd’hui que la musique est de plus en plus présente et c’est tant mieux ! Et les moments live restent ce qui m’apparait comme le plus intéressant dans la musique aujourd’hui.

Avez-vous des anecdotes par rapport à cela?
Pascal : Des anecdotes ? Nous venons d’en citer quelques unes et nous en avons pas mal en stock …
Après je crois que celles que je préfère ne sont pas citables ici, ce que je peux juste dire, c’est quand même que Denis et Mathieu ont porté la barre assez haute et ce sont eux sans conteste qui tiennent la palme de nos plus beaux fous rires (sourires).
Fred :  ….. Peut être le concert du festival de Saffré. N’ayant pas trouvé de camion pour y aller, nous avons emprunte une camionnette Citroën type H des années 60 en taule ondulée jaune pétant, genre camionnette pour faire le marché. Le mec de la sécurité ne voulait pas nous laissez entrer. 

La séparation?
Fred :  Cette question est arrivée au moment où l’embarcation prennait l’eau de tous les cotés : Roadrunner qui nous étouffait. Il y avait des inspirations différentes, un certain clivage qui s’installait. En répète, plus rien ne sortait ou difficilement. Et puis le manque d’un certain courage peut être aussi, courage qui aurait du nous amener à quitter notre confort Angevin.
Pascal : Les “ruptures” font partie du vivant, non ? 
Et plutôt que de parler de “séparation”, je préfère le terme choix; Juste le choix d’individus qui préfèrent encore préserver leur carré d’évasion plutôt que de laisser un devenir qui ne correspond pas à toutes les attentes de chacun . Un groupe, c’est avant tout des hommes ou femmes ensemble qui se retrouvent dans les idées et les émotions qu’ils partagent.
Si leur choix diverge, le plus important est de laisser le groupe tel qu il s’est formé avec cet état d’esprit qu’il avait. 
Et après ces quelques années, je suis assez content de penser que les Cut sont et restent un moment de partage à part avec une musique qui collait  avec nous à ce moment là. Si certains  de nous avaient continué avec le nom des Cut, je ne pense pas que les autres les auraient empéché mais ce ne serait plus les Cut the Navel String aujourd’hui. 
Dans ce sens, je suis très heureux de ce que nous avons réussi à faire à l’époque. 
Fred : restons honnêtes ! nous sommes restés sur un sentiment d’aventure inachevée et sans doute aurions nous gagné en maturité à nous ressererrer et évacuer tout ce qui nous polluait ...

Qu’on fait les membres du groupe après l’arrêt?
Pascal : Plein de choses …(sourires) 
Des enfants, des projets, des disques, des sculptures, des tournées, des moments de vie  ….
Nous (moi et fred) avons laché Angers et nous avons repris les répets depuis peu .
Frank a continué et créé plusieurs autres groupes (Kilo, Ekka ...etc) 
Mathieu a rejoint Lojo, il joue maintenant dans un autre groupe (Sweet back) et surtout, il s‘est lancé dans la sculpture.
Denis vit à Nantes et a ses projets musicaux aussi, je crois ...
Fred : Pour ma part j’ai essayé de raccroché les wagons avec ce que je faisais avant à savoir  de l’éducation populaire puis la chance m’a conduit vers d’autres rencontres et un autre métier.
Pascal : Pour ce qui nous concernent  (moi & Fred), on continue notre chemin musical  à notre rythme et à notre manière ...
S’il y a deux choses que je retiens dans l’after CUT, c’est le projet Belbenem et la reprise musicale …
Mais ce sont d’autres histoires (sourires) ...

Depuis 2014 vous avez créé une page Facebook. Nostalgique?
Pascal : Juste pour le fun au départ, l’idée était de se partager quelques souvenirs ….
Par ailleurs, nous avons en tête de produire cet enregistrement de la Black box qui nous tient à cœur. 
Facebook est juste le moyen de pouvoir communiquer avec ceux qui sont toujours interessés par ce groupe et la mémoire de ce qui a été fait.

Justement que pensez-vous du  nouveau label «Nineteen Something» crée par Eric Sourice des Thugs et Franck Frejnik. Seriez-vous ok pour qu’ils ressortent «Takis»?
Fred/ Pascal : En ce qui concerne Takis, il est entre de très bonnes mains et  “Nineteen Something” est une initiative dans laquelle nous pouvons nous retrouver dans la mesure où l’histoire de ces années est commune. il y a un sens en tout cela .
Nous sommes en contact avec Eric Sourice et espérons bientôt voir enfin cet enregistrement, qui mérite d’être gravé sur vynil, dans leur catalogue.

Il était question de ré-éditer un enregistrement encore inédit et jamais sorti en public. L’enregistrement a été réalisé dans les studios de la blackbox par Peter Deimel (& Ian Burgess) juste avant l’album Takis. Où en est ce projet?
Pascal : Bien informé (sourires)… 
Oui,nous aimerions édité et publié en vynil les enregistrements réalisés à la black box et ce,  pour plusieurs raisons :
Nous adorons Peter (Deimel) humainement et aussi le travail qu’il a réalisé avec nous (et “pas seulement Peter, je te rassure”). 
C’est quand même le premier enregistrement réalisé à la Black Box. Bel hommage aussi pour Iann Burgess qui lui aussi s’était aventuré dans l’enregistrement d’une de notre première démo.
J’ai évoqué le projet à Peter l’année dernière (aux 20 ans de la Black Box) et il est enchanté de l’idée. 
Nous pensons aussi  que ces enregistrements sont bien plus prêts de la réalité des Cut de cette époque (versus Takis). Pas mal de gens nous demandent si nous avons des inédits. Et bien j’ai envie de dire à tous que nous espérons que ce projet va naître assez rapidement. 
Un vynil nous toucherait aussi beaucoup  Dans le fond, les années 90 marquent la fin d’un siècle. C’était l’avènement du CD (encore une fois l’industrie nous a tous berné sur ce point….) Bon on n’est pas là pour faire des “pieds de nez” non plus. En tout cas, nous espèrons vraiment que ce sera un vynil, produit avec des gens qu’on aime bien  et pour tous les gens qui nous aiment bien  … 
La black box, Peter, Yann, «Nineteen Something», “Atypeek Music” (et cela c’est pour très bientôt avec un remix de l’enregistrement de Takis par Nicolas Dick)  , … tout cela a un sens et c’est tant mieux !
Et plus que cela, ce qui reste encore intéressant c’est de pouvoir laisser une trace de toute cette période (et pas seulement des Cut).
Nous sommes dans la transition de siècle et d’idée. 
J’espère encore croire que de nouveaux horizons et de nouvelles idées arrivent. Plutôt que d’attendre, je crois qu’il faut continuer à faire tourner la machine à penser, prendre sa guitare, agir ou faire tout ce que l’on veut et avons envie de réaliser, …..  et surtout ne pas consentir à des idées qui n’en sont pas. 

On peut imaginer une reformation du groupe?
Fred :  J’ai souvent eu un rêve que je crois partager avec Pascal bizarrement . Dans ce rève, nous nous retrouvions sur scène apres des années. C’etait une vraie catastrophe !!! Je serais incapable de rejouer les morceaux des Cut, j’ai tout oublié .. en revanche je serais heureux de retrouver les gars en répète pour d’autres projets. Mais ça...

Pascal : Oui, c’est assez “étrange” et difficile à concevoir … En même temps je crois que  les histoires ne finissent jamais …
Oui, moi aussi , un matin, je me suis réveillé dans les vapeurs d’un rêve ou cauchemar onirique. 
On nous avait demandé de nous reformer pour un concert pour une occasion stupide (anniversaire ou autre) et nous avions suivi pour je ne sais quelle raison. 
Je me souviens ensuite de monter sur scène. 
Il y avait plein de têtes qu’on connaissait dans le public, un mélange des rencontres que chacun peut avoir fait dans sa vie… l’endroit aussi était tout simplement improbable et somptueux.
 Nous étions visiblement attendu (un coté mégalo ou mytho sans doute …) !!! 
Nous commençions un de nos titres et là, blackout sur les accords et riffs … 
Un blanc sidéral suivi d’un cafouillage bruitiste improvisé ... on ne se souvenait même pas de comment jouer nos propres morceaux … 
Mais on continuait vers des horizons qui nous étaient inconnus ...
Vous dire si ce qui sortait était audible ou juste un énorme cafarnaum …. je n’en sais rien !
Libre à chacun d’imaginer ce qui pourrait naître d’une telle aventure, non ?


elscalp@gmail.com
cutthenavelstring@gmail.com

Interview : Jean-Louis
Photos : stéphane Chailloy, D.R

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