mercredi 18 mai 2016

Teenage sin taste

Nous avions interviewé Will (Teenage sin taste)en 2014 pour la sortie de son ep « Skin » et «almost transparent Blue ». Aujourd’hui Teenage Sin taste, plus prolifique que jamais nous sort ce fabuleux 5 titres « Some Perfect dreams ». Il était important pour Paranoïa fanzine d’en savoir plus sur ce projet et de vous faire découvrir ou redécouvrir Teenage sin taste.


1) Alors tu as sorti il y a peu de temps ton nouvel ep « Some perfect dreams». Peux-tu nous retracer son parcours, de l’écriture à la réalisation ?
Ce EP a été fait à la fois très lentement et rapidement ! Certains titres datent d’il y a bien un an et demi mais je les avais mis de côté car je trouvais qu’ils tournaient un peu en rond, que c’était une redite des anciens titres , un peu comme si je faisais toujours le même morceau depuis 2/3 ans en gros... Pour tout dire j’avais sérieusement envisagé de laisser tomber TST, justement pour ces raisons là, le manque d’inspiration, de motivation, la petite déprime de la quarantaine, envie de passer à autre chose... Puis le jour où j’ai remis le nez dedans, tout est allé très vite. J’ai réussi à finalement être convaincu des nouveaux arrangements de ces vieux titres, puis en triturant ma guitare j’ai sorti des plans qui sonnaient plutôt bien. C’est devenu «Clear» dans un premier temps, puis «Stuck» peu après. Ces deux là étaient totalement terminés en 3 jours !

2) Qu’est-ce qui t’a décidé à composer ce nouvel ep, quel a été le déclic ?
J’ai tout un stock de bribes de morceaux que j’arrange au fil du temps... Il n’y a pas vraiment de déclic, c’est au jour le jour, à mon rythme, quand je sens qu’un titre sonne et est terminé, je passe au suivant, je laisse reposer... Je peux rester des mois sans rien faire, et en un week end poser les (grosses) bases d’un ou plusieurs morceaux, voire en terminer, tout dépend du moment, je marche au feeling. Sans doute le fait de bosser sur d’autres projets en parallèle me pousse inconsciemment à rouvrir mes sessions et à me sortir les doigts ! (rires)
J’essaie de prendre un maximum de recul et évite la précipitation, même si c’est dans l’urgence que j’ai composé mes meilleurs titres selon moi !


3) Sur ce projet Teenage Sin Taste, tu fais tout tout seul, comment gères-tu tes instruments. Peux-tu nous décrire en quelques mots comment tu enregistres tes parties ?
Tout est fait de A à Z dans mon salon, le casque sur les oreilles ! C’est hyper aléatoire, mais je débute le plus souvent par une boucle de batterie plus ou moins élaborée qui peut donner le ton, le rythme peut être rapide, mid-tempo, ou le son des éléments claquants ou au contraire un peu plus soft, puis je joue par dessus un riff de basse que je fais évoluer au fur et à mesure, que je peux copier/coller dans un premier temps pour donner forme à la structure, puis les guitares, puis les voix en tout dernier. Il m’est arrivé de récupérer un bout de guitare d’un autre morceau que je n’ai finalement pas gardé pour commencer un nouveau titre... Enfin tu vois, c’est carrément du bricolage !
Pour ce EP j’ai quand même voulu faire évoluer le son TST, que ce ne soit plus des gros morceaux bien bourrins noise, je travaillais le son des guitares, je lorgnais involontairement vers un côté un poil plus «electro», même si inévitablement «je réveille toujours le punk qui est en moi» à la fin ! (rires)
Par contre le chant c’est une vraie plaie, c’est l’étape sur laquelle je passe le plus de temps et pour laquelle je ne suis jamais satisfait... De même pour les textes de mes aciens titres qui ont toujours été un peu légers sous différents aspects. Pour Some Perfect Dreams c’est, je trouve, un peu mieux élaboré, inspiré de faits vécus... «Give me my Tramadol and my codeine, and I’ll be ok for some perfect dreams...» on est clairement dans le vrai : en Angleterre avec les copains de Curl pour des concerts, une hernie discale qui se réveille le premier jour en arrivant, l’envie de se jeter par la fenêtre tellement la douleur est insupportable, un médecin qui vient m’osculter et me prescrit ces médicaments là en doses de cheval afin d’être d’aplomb pour assurer les lives avec tout ce que ça engendre, on est dans le vrai quoi ! (rires)

4) Les titres de ton nouvel ep, me font voyager, m’évader. C’est ce que tu recherches pour l’auditeur ?
Il n’y a pas de plan préparé à l’avance, je ne me dis pas qu’il faudrait un morceau dans ce genre là, un autre dans ce style là... Ça évolue naturellement avec les influences du moment. Si ça sonne hypnotique et que ça colle à l’ensemble, que c’est homogène, c’est parfait. Pareil à l’inverse, si des tonnes de guitares et de larsens font que ça sonne bien violent et que ça le fait aussi, je fonce dans cet esprit là, mais toujours en gardant une unité mélodique. Assez égoïstement il faut avant tout que ça me plaise. D’une manière générale, composer POUR plaire c’est fichu, tu perds l’essence même du truc, à mon avis. Bien entendu quand un pote ou quelqu’un qui a écouté mes prods m’envoie un message en me disant qu’il est raide dingue de tel ou tel titre, ça me fait ultra plaisir, je ne vais pas le nier !

5) Le panel musical est assez large je trouve, on y retrouve, de la cold, de la new wave, Front 242, Suicide, les Thugs pour le chant, etc... J’imagine que ces groupes t’ont influencé. Te sers-tu de cela pour composer ?
Tu es le premier à me citer Front 242 ! Je ne crois pas avoir écouté un seul titre en entier ou un album de ce groupe ! (rires)
Les influences sont quotidiennes. Musicalement on tourne toujours inévitablement plus ou moins autour des groupes qui m’ont forgé depuis que j’ai 14/15 ans, The Jesus and Mary Chain, les Thugs bien sûr, Einstürzende Neubauten pour ne citer qu’eux, mais j’essaie de rajouter d’autres choses moins évidentes à discerner. Le dernier album de Chelsea Wolfe «Abyss» m’a mis une claque monumentale (et en live on se prend carrément une grosse mandale de forain (rires)), les deux albums de David Lynch (Crazy Clown Time et The Big Dream) sont mes albums de chevet depuis leurs sorties, le dernier Nick Cave est fantastique également, je me suis refait une cure de The Gun Club, Skinny Puppy, Deity Guns.... enfin bref, même si ça ne se ressent pas à la première écoute, ces influences sont là... J’ai déjà quelques démos qui sont presque à l’opposé du dernier EP ! A l’état actuel ça sonne comme du Lynch ou du Chelsea Wolfe justement, mais ça va encore évoluer, on n’est pas à l’abri de tout balancer à la corbeille et de repartir de zéro !
Concernant les textes, comme je le disais plus haut, on est un peu plus dans le «réel» qu’auparavant... Avec le recul je me rends compte que «Childlike Suicide Machines» fait indirectement référence aux évènements récents, ou comment retourner la tête de minots en leur promettant une vie meilleure ailleurs... Pareil pour «Clear» qui peut être à double lecture, «I’m the hatred that feeds your desire / I’m the cancer that saves you in the end», qui est le bien, qui est le mal, qui manipule qui, qui enfile qui... De là à dire que TST devient engagé, non et mille fois non ! Bien sûr j’ai des convictions, des avis sur les différentes actualités, mais ce n’est pas mon rôle de faire dans la démago, Saez le fait très bien ! (rires)

6) La preuve avec cette reprise du groupe Hüsker Dü «Don’t want to know if you are lonely». Un hommage ?
Oui alors cette reprise c’est un coup de tête. J’ai ré-écouté Candy Apple Grey il y a peu, et «Don’t want to know...» est tellement puissante que je me suis dit que peut être à la sauce TST ça pourrait être pas mal. J’aimais beaucoup Husker Dü étant plus jeune, sans être vraiment fan (préférant nettement plus Sugar), mais ce morceau là est vraiment particulier. En une seule journée il était plié, le lendemain je le mettais en ligne !

7) On te voit jouer peu dans la région, pourtant tu es quand même connu, comment cela se fait -il ?
«Connu» c’est un bien grand mot ! Je ne suis pas certain qu’en citant «Teenage Sin Taste» dans une soirée à Marseille les gars sautent au plafond ! Disons que ça se fait par le bouche à oreille... Je suis autant champion de la promo que joueur de foot : une vraie brêle ! J’ai beaucoup plus de retours qui viennent d’Allemagne, d’Angleterre, des US, du Brésil, de Russie ou de Belgique (où une émission de radio a carrément consacré une bonne partie à TST !)  que de France... Je me demande encore comment ces gens là ont entendu parler de TST vu que je ne passe que par Facebook et mon Bandcamp ! Je fais mon truc tranquille, et si un jour ça marche ici c’est très bien, si ça reste confiné comme ça l’est actuellement, c’est très bien aussi, tant que je continue à faire ce que j’ai envie de faire, à mon rythme, ça me va ! C’est vrai qu’en faisant du live, TST toucherait sans doute un peu plus de monde, mais étant seul aux commandes, tu te retrouves vite dans une formule karaoké pas vraiment excitante. Si un jour je dois monter sur scène avec ce projet, ce sera avec un mini-groupe, j’ai envie de garder le côté grosses guitares/noise qui fait le son TST. Je l’avais envisagé il y a quelques temps, mais niveau planning des uns et des autres c’était compliqué. D’autant que je veux absolument monter ce groupe qu’avec des potes, le côté humain est primordial : top à la déconne, mais quand il faut envoyer, on fonce tête baissée ! (rires)

8) Tu as d’autres projets que Teenage sin taste. Où en es tu exactement?
Toujours Curl ( https://curlmusic.bandcamp.com/album/exit-real-life ), notre dernier album est sorti sur le label D-Monic il y a un peu plus d’un an, et pour lequel nous avons eu de très bons retours ! On a également fait une poignée de concerts épiques, dont deux en Angleterre, le premier dans un petite salle de 200 places bien remplie, le second le jour du Record Store Day en pleine après midi dans une rue fermée où pas loin de 2000 personnes se baladaient ! Une sacrée expérience vu mon état de santé à ce moment là !
Et bien évidemment toujours l’homme de l’ombre d’Alex Sindrome ( https://alexsindrome.bandcamp.com/ ) pour qui je voue un amour sans faille, musicalement, textuellement et humainement depuis ses tout débuts ! Il m’envoie ses démos que j’essaie d’arranger si besoin en rajoutant des lignes de synthé basse, des guitares (qu’on se partage avec Greg du groupe Frozen Dead Kittens), je mixe certains titres pour tenter de leur donner un peu plus de pêche, je finalise le tout... Qu’il me fasse encore confiance après presque 7 ans de collaboration me touche énormément ! C’est ce qui me plait avec ces projets, ils sont tous les trois de différents styles : TST le côté «punk», noise, CURL un peu plus shoegaze, dreamy, et Sindrome carrément electro pop dark tout en français !


9) Ton cd va sortir sur un label grec. Comment s’est passée la connection avec ce label?
Quelques jours après avoir mis en ligne le 5 titres, un gars, Kostas, m’envoie un message pour me dire qu’il a pris une claque et qu’il voudrait le sortir sur Melotron Recordings son label, tout simplement ! La particularité de ce label là c’est que les sorties sont des petits objets en édition limitée comme des cd 3’’, des cassettes, aux packagings atypiques... le concept me plaisait bien ! J’étais libre de faire ce que je voulais pour le visuel, l’ordre des titres... en fait je garde l’état d’esprit un peu do it yourself de TST, je reste «maître» du projet, le label sort le cd et en fait la promo dans son petit réseau. J’avais déjà fait l’expérience d’un label auparavant, mon précédent ep SKIN était sorti sur D-Monic en digital, et on espérait avec Laurent le boss obtenir suffisamment de ventes pour ensuite en faire un vinyl 10’’. Sauf que bon, comme d’habitude, ça plait, ça en parle, mais ça s’arrête là. Pour tout dire, il me reste des cartons entiers de «Almost Transparent Blue» mon premier vrai album d’il y a 4 ans. Mais encore une fois je ne m’en prends qu’à moi, à vouloir gérer seul tout le truc et ne pas être un bourrin de la promo, ça ne risque pas d’aller plus loin... (rires). Dans tous les cas le cd 3’’ devrait sortir d’ici entre avril et mai.

10) Quelque chose à rajouter ?
Une petite référence qui vaut mieux qu’un grand discours :
«We’ve been told so many lies, we can’t believe in paradise
And because time is passing fast, we dry our eyes and try to be
As happy as possible !!!!»


Interview : Jean-Louis

Photos : Charlotte et DR

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